mercredi 10 décembre 2014

The Breakfast Club (John Hugues, 1985)



Le pitch 
Cinq lycéens se retrouvent en retenue un samedi. Un athlète, un rebelle, une fille à papa, un geek et une freak. Sous la surveillance du professeur Vernon, ils doivent rédiger une dissertation sur un sujet pas si anodin que ça : « Qui pensez-vous être ? » 
Spoiler : à la fin, le rebelle emballe la fille à papa, la freak emballe l’athlète et le geek, qui n’emballe personne (normal, c’est un geek, plus tard il sera patron de Facebook ou de Google, je suppose que ça compense), rédige une dissertation commune en forme de pied de nez : « Nous sommes tous un athlète, une fille à papa, un rebelle, un geek et une freak. Sincèrement, signé : le Breakfast Club » 

Le casting dont on se souvient 

Bonjour bande de raclures de bidet,
je serai votre antagoniste pendant tout le film.
Paul Gleason, qui joue M. Vernon, le connard de surveillant, jouera souvent les connards puisqu’on le revoit en chef de la police dans Piège de cristal (Die Hard, McTiernan, 1988). Il parodiera même son rôle de Vernon dans le très mésestimé Sex Academy (Not Another Teen Movie, Gallen, 2001). 

 
Salut. J'suis quaterback, mais tu peux dire QB,
parce que c'est plus rapide à dire que quaterback.
Emilio Estevez était une des découvertes d’Outsiders (Coppola, 1983), le film qui a révélé Tom Cruise, Matt Dillon, Patrick Swayze, Rob Lowe… Dans les années 1980 il a connu un certain succès, mais on ne peut pas dire qu’on l’ait beaucoup vu récemment. Ce frère de Charlie Sheen (si !) est aussi bien connu outre-Atlantique pour être l’entraîneur de hockey dans Les Petits Champions (The Mighty Ducks, Herek, 1992). Le film a certainement moins marqué en France… 

Les scènes cultes 

T'as pas intérêt (à m'oublier), des Simples d'Esprit.
- Si une chose est culte dans ce film, même en France, c’est sa bande originale : Don’t You (Forget About Me), des Simple Minds, pour toujours associé aux mèches adolescentes des années 1980. 
"Bande de p'tits salopards ! Qui veut aller pisser ?"
 - Les scènes où les cinq ados font face à Vernon ont donné le la de toutes les confrontations de l’adolescence envers l’autorité en ambiance lycéenne (le rebelle à blouson assis sur son bureau, le geek qui prend des notes, la freak qui dessine au fond de la salle…). 
"Attends... mais t'es carrément plus hot que moi !"

"Ah, voilà, c'est mieux. Tu vas voir, le style Candy Crush, c'est complètement d'avant-garde !"

- La scène de transformation de la freak en nunuche rose bonbon, que le film nous décrit comme une sublimation du personnage alors que a) elle est nettement moins jolie comme ça, et b) c’est au contraire le triomphe du conformisme. Comme elle débouche en plus sur un baiser entre l’athlète et la freak, idée qui sort de nulle part (il n’y a eu aucune tension de séduction entre eux pendant tout le film), je trouve cette scène totalement abracadabrante. 

Et aujourd’hui, qu’est-ce que ça donne ? 
Bon, je vais avoir un problème, c’est que je m’attaque à John Hugues. Si ce nom ne vous dit rien, sachez que John Hugues est considéré comme le cinéaste qui a compris la jeunesse américaine. Il a réalisé The Breakfast Club, mais aussi La Folle Journée de Ferris Bueller (Ferris Bueller’s Day Off, 1986, qui a fortement inspiré une de mes séries cultes, Parker Lewis ne perd jamais), Une créature de rêve (Weird Science, 1985, dont la série Code Lisa est une adaptation)… bref, pour simplifier, c’est lui qui a inventé le teen movie. Le problème, c’est que je n’aime aucun de ces films. Je trouve les personnages de Hugues terriblement énervants, stupides, égoïstes et archétypaux au possible. Seulement… c’est aussi pour ça que Hugues est adulé : ces archétypes qu’on a vu cent mille fois ailleurs, c’est lui qui les a inventés. 

Mais revenons à The Breakfast Club. Il faut reconnaître une chose, le film comprend effectivement l’âge dont il parle. C’est un des premiers films à saisir et montrer le mal-être des ados américains, cette pression délirante de la société qui leur est tombée dessus depuis la libération des années 1960. Les cinq archétypes se méprisent par principe, jusqu’à ce qu’ils commencent à se découvrir des points communs. Leur soudaine proximité appelle des questionnements : maintenant, on est amis, mais lundi, quand la classe reprendra, est-ce que le rebelle ne me cassera pas la figure ? Est-ce que la princesse rose bonbon à ma droite me parlera ? 

Par ailleurs, le film est tellement fondateur que vous avez forcément vu, dans une série, un film ou un dessin animé, une bande de jeunes sur ce modèle. Les archétypes et leur interaction si classiques de la highschool à l’américaine, qu’on se traîne de Buffy contre les vampires à Daria, d’Angela, 15 ans à Glee… ils sont nés là, dans The Breakfast Club. Et une influence pareille, ce n’est pas négligeable. 

Surtout, Hugues fut le premier à aller au-delà de la différence, de la simple confrontation des modèles, pour montrer que l’adolescence était un moment difficile pour tout le monde, quel que soit son clan. L’ennemi, ce n’est pas le rebelle pour le geek, ni la princesse pour la gothique. L’ennemi, c’est la société qui essaie de vous formater, c’est the Man, incarné ici par le rigide professeur Vernon. Hugues reprendra cette idée dans Ferris Bueller, en plus loufoque. À l’époque, c’était tout simplement révolutionnaire. 
Mais voilà, vu d’aujourd’hui, le film accuse un rythme faiblard et des personnages si caricaturaux qu’ils en sont vides de toute substance. L’idée au-dessus est bonne, mais l’exécution difficilement supportable à nos yeux habitués à un peu plus de subtilité dans le traitement. En fait, je crois que ce qui m’empêche de vraiment aimer ce film, c’est que je n’étais pas ado dans les années 1980. Et qu’il semble que j’ai raté une expérience pas forcément drôle, mais clairement unique. Car plus personne ne sera ado dans les années 1980. 

Le bonus
Ah ben oui, va falloir vous le fader dans la caboche toute la journée. Sentez-moi comme ça dégouline d'années quatre-vingt !


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