mercredi 4 mars 2015

Beetlejuice (Tim Burton, 1988)

Le studio n’aimait pas le titre Beetlejuice, et a suggéré d’appeler le film Ghost House.
Ce à quoi Burton répondit « Oui, et pourquoi pas Scared Shitless [“À se chier dessus de trouille”] ? »
Il a eu paraît-il très peur quand il a vu les pontes du studio l’envisager pour de bon.

Barbara et Adam Maitland forment un couple heureux quoique sans enfant, qui meurt tristement autant dans un accident de voiture que dans les premières minutes du film. C’est triste. Mais leurs esprits demeurent dans leur belle maison, et c’est terrifiés qu’ils voient débarquer un nouveau couple d’habitants, les Deetz : le surmené Charles, l’envahissante Delia et leur gothique adolescente Lydia. Incapables de s’en débarrasser eux-mêmes, notre couple de fantômes fait appel à un « anti-exorciste » trépassé. Vous connaissez son nom. 

D’où ça vient ? 
En 1988, Tim Burton a essentiellement réalisé Pee-Wee Big Adventure, version cinéma de l’émission pour enfants sous crack de Pee-Wee Herman. Le film étant bon, mais surtout marqué par l’esthétique du comique, personne n’attend la nouvelle œuvre de Burton (à part ceux qui connaissent ses courts-métrages Vincent ou Frankenweenie). Il reprend alors un projet de film d’horreur à base de démons, et modifie substantiellement le contenu.

Tim Burton.
Je vois vraiment pas pourquoi les dirigeants en col blanc des studios
ne lui faisaient pas confiance...
À la base, Betelgeuse (oui, son vrai nom c’est Betelgeuse, comme l’étoile… "Beetlejuice" c’est juste un rébus pour faire prononcer son nom à moment donné dans le film, mais le département marketing a préféré garder ça pour le titre) était un démon reptilien ailé venu sur terre pour tuer les Deetz. Il aurait notamment tenté de violer Lydia, se serait transformé en écureuil enragé pour attaquer une petite fille… bref, un script nettement moins sympathique. 

 
Vous voyez, c'est écrit : Be-tel-geuse.

Burton change tout ça et ajoute sa patte visuelle, qui prend définitivement ses marques : les rayures noir et blanc, les vers des sables, le gothique tourmenté… et Michael Keaton, qui fera si grande impression qu’il le gardera (envers et contre tous) pour incarner Bruce Wayne dans ses deux Batman

Et aujourd’hui, qu’est-ce que ça donne ? 
Visuellement, le film est bien sûr un peu daté, mais il a un charme indéniable. Comme un délire de sale gosse : Betelgeuse est répugnant (Keaton a énormément improvisé sur le plateau), le couple Maitland adorable, Lydia est charmante (toute jeunette Winona Ryder), les Deetz agaçants, les décors magnifiques et l’intrigue finalement prenante, et plutôt originale. 

Une vision de l'au-delà parfaitement crédible : l'enfer ressemble à une longue file d'attente à la Poste.
Personnellement ça me parle.
Mais étonnamment, on se souvient surtout de deux choses : la série animée qui en fut dérivée, qui est arrivée chez nous bien avant le film, et la musique monumentale de Danny Elfman. C’est d’ailleurs amusant de voir que le film est beaucoup plus dark que le dessin animé (qui, lui, jouait surtout sur le côté crade, avec un Beetlejuice amateur de cafards et de crottes de nez). 

Le casting dont on se souvient 

"J'ai vu l'avenir, Alec... tu vas jouer dans The Shadow... et moi dans L'Île aux pirates...
- Arrête tes conneries Geena.
- Ah, et je jouerai dans un bon film de Ridley Scott.
- Tu vois bien que c'est n'importe quoi !"
Alec Baldwin et Geena Davis 
Les grands oubliés du film, puisque la série animée désintègre leurs personnages. Ils sont pourtant très attachants, leur tendresse et leur détresse passent vraiment bien à l’écran. 

J'suis trop dark !
Winona Ryder 
On peut dire qu’elle s’en sort bien : elle reviendra bien vite dans Edward Scissorhands (Edward aux mains d’argent, Burton, 1990), puis dans le Dracula de Coppola (1992) et dans plein de films par la suite. À noter qu’elle a eu du bol : le rôle avait été proposé à Lori Loughlin, Diane Lane, Sarah Jessica Parker, Brooke Shields, Molly Ringwald et Jennifer Connelly, qui l’ont toutes refusé. 

"Guess what? I'm Batman!"
Michael Keaton 
Bon, vous savez tous que Michael Keaton souffre en France de sa terrifiante ressemblance avec Julien Lepers. Dans ce film ça ne gêne pas trop vu qu’il est méconnaissable, mais c’est un acteur généralement épatant, comme il le prouve dans le très, très bon Birdman, qui vient de sortir et que je vous conseille. Ah, et il doublait Ken (le copain de Barbie) dans Toy Story 3. C’est rigolo. 

Bonus 
Une suite était prévue, qui devait s’intituler Beetlejuice Goes Hawaiian. Non, ce n’est pas une blague. D’ailleurs elle est toujours annoncée, mais seulement annoncée, rien ne semble avancer de côté-là, donc forcément, il n’y a pas de bande-annonce (en revanche, en tapant "Tim Burton", vous trouverez son prochain film, Big Eyes, qui a l'air cool - plus que les dernières saloperies qu'il nous a servies en tout cas). Alors je vous laisse plutôt avec ce putain de générique à réveiller les morts. Parce que Danny Elfman, à l’époque, c’était la mégaclasse. 


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire