mercredi 11 mars 2015

Hairspray (John Waters, 1988)

L'affiche ne joue même pas sur les rondeurs de l'héroïne, signe qu'on s'en fout pas mal.
Bon, en fait c'est la jaquette du DVD, je n'ai pas réussi à trouver l'affiche originale en bonne qualité.
Baltimore, 1963 : la jeune Tracy Turnblad ne rêve que de participer au Corny Collins Show. Bien qu’en surpoids et d’extraction modeste, elle devient une star de l’émission de danse et commence à utiliser sa notoriété pour défendre la cause de l’intégration (l’émission ne laisse évidemment pas les noirs et les blancs danser sur le même plateau, et propose même un « Negro Day »). Ce qui ne plaît pas à tout le monde. 

D’où ça vient ? 
Pour changer, parlons un peu du réalisateur, John Waters

Une moustache bien particulière et caractéristique du personnage.
Il s’agit en fait d’un hommage au chanteur Little Richard.
John Waters a grandi à Baltimore, Maryland, et vous ne pouvez pas le rater vu que tous ses films s’y déroulent. Baltimore n’est pas exactement le paradis sur terre, c’est plutôt l’équivalent américain de Saint-Étienne. Une ville industrielle où le chômage et la ségrégation ont mené à une situation de guerre civile, à la légalisation de l’inceste et de la pédophilie, et à… euh… excusez-moi, un ami stéphanois (apparemment les Saint-Étiennais s’appellent comme ça entre eux) vient de m’appeler pour me dire que j’exagérais un chouïa, vu qu’aucun homosexuel n’avait été pendu à Saint-Étienne depuis juin dernier, donc ça va. Bref, Baltimore, ça craint un peu. Mais on s’y amuse bien. 
Gamin, Waters était fasciné par la violence et le gore, et il a passé toute sa carrière de cinéaste à explorer le mauvais goût. Il est réellement remarqué par le grand public grâce à Pink Flamingos (1972), dans lequel il explore l’extrême du genre, notamment quand il fait manger à son acteur transsexuel fétiche Divine une crotte de chien devant la caméra. Récemment il s’est un peu calmé, avec des comédies comme Pecker (1998) ou Cecil B. Demented (2000), mais c’est en 1988 qu’il a vraiment su toucher le grand public avec la comédie musicale Hairspray, qui n’usurpe ni le terme « musical », ni celui de « comédie ». 

Et aujourd’hui ça donne quoi ? 
Hairspray, c’est donc une vision du Baltimore des années soixante particulièrement enchanteresse, avec un apartheid de fait qui aujourd’hui est carrément choquant (le « Negro Day », ça fait quand même bizarre à lire). 

Aaaah, les années 1960 et leurs danses subtiles.
Pourtant le film est enthousiasmant, car très, très positif. Déjà l’héroïne, jouée par une Ricki Lake qui a eu bien du mal à conserver son surpoids à travers les leçons de danse nécessaires au rôle, incarne une jeune fille incroyablement sympathique. Drôle, enjouée, elle ne perd jamais le nord, danse merveilleusement et reste de bonne humeur en toute circonstance, sans avoir l'air cruche pour autant. Tracy se moque complètement de son surpoids, elle sait qu'elle est cool et n'a aucun problème d'intégration. 

Le film reste vraiment agréable à suivre, surtout si vous aimez la musique des années 1960, qu’elle soit « blanche » ou « noire » (aujourd’hui tout s’est tellement mélangé qu’on est bien en peine de faire la différence, comme quoi c’est bien con de séparer les genres). 
Et surtout, il traite avec fun et intelligence son sujet de fond : l'intégration. Parce que si, en apparence, le film parle de l'intégration des noirs (déjà un sujet pas du tout anodin), en sous-texte on a quand même ici une histoire dont l'héroïne est une obèse heureuse et sans complexe (chose impensable dans le cinéma de l'époque, et encore difficile aujourd'hui) et dont un des acteurs principaux est transsexuel. Sans que ce ne soit jamais le thème du film, ni même un sujet de discussion (seuls les Van Tussel, antagonistes de l'histoire, y trouvent à redire, tout le reste de la ville s'en fiche). On pourrait croire le message du film est un peu daté alors qu'en fait il a, encore aujourd'hui, des années d'avance !
Le film a d'ailleurs tellement plu qu'il a été adapté à Broadway en comédie musicale en 2002. Et franchement, ça pète la classe.

Le casting dont on se souvient 

Ricki Lake 

Je vous jure qu'elle danse super bien.
Une comédienne au parcours particulier : son premier grand rôle fut Hairspray, qu’elle enchaîna sur une quinzaine de film avant de sombrer dans l’oubli. Ou pas : après un régime drastique, elle se retrouve présentatrice de son propre talk-show, très populaire, et reprend sa carrière de comédienne. 

Jerry Stiller 

C'est aussi à lui que je pense quand j'imagine le père de Howard Wolowitz
dans The Big Bang Theory. Je sais pas pourquoi. C'est probablement raciste...
Pour tous les fans de Seinfeld comme moi, Jerry Stiller sera toujours le père de George Constanza (c’est une tradition de faire jouer les parents par des comédiens connus, regardez Elliott Gould dans Friends). Mais pour les autres, disons simplement que c’est le père de Ben Stiller. En vrai.

Pia Zadora 
Le twist, ça va, le blues, ça va, mais les beatniks... ça coince un peu.
Il y a Pia Zadora dans ce film. Oui, Pia Zadora ! Bon, elle a un tout petit rôle (très drôle toutefois), mais quand même. 
Quoi ? Mais si, Pia Zadora ! Bon sang, elle jouait dans Le Père Noël contre les Martiens
Non ? Bon, et ça, ça vous dit quelque chose ? 


Ah mais ! 

Bonus 
La comédie musicale Hairspray a été adaptée en 2007 au cinéma par Adam Shankman, avec Nikki Blonsky dans le rôle de Tracy, Michelle Pfeiffer en Velma Von Tussle et John Travolta en… Edna Turnblad (logique, le rôle de la mère de Tracy étant à l’origine tenu par Divine). Oui, c'est une adaptation cinéma de l'adaptation musical du film de Waters. Et franchement, je l’ai trouvé plutôt cool, bien rythmé et tout aussi enthousiasmant que l’original. Même si, en 2007, c’était forcément moins risqué qu’en 1988, la dénonciation de l’intolérance est présente et le film est agréable. Bref, si vous craignez que le style « sixties vues par les eighties » vous dérange, c’est un palliatif très convenable, et un vrai remède contre la morosité. 

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